Quels sont les liens entre les mots et le monde ?
La distinction entre énoncés performatifs (« Viens ici… je te promets de… je m’excuse… je déclare que… »), et énoncés descriptifs (constatifs) n’est pas si claire puisque un même énoncé comme : « Quelqu’un vous appelle au téléphone », qui semble être une pure description, change en fait le monde de celui-celle qui le reçoit. Son monde n’est plus le même avant et après cette information. Si l’on rajoute à cela la dimension pragmatique, on verra alors qu’un énoncé comme « ça va » change de sens s’il est une réponse à « comment vas-tu ? » ou à « je m’excuse », et, bien entendu, selon le ton de la voix.
En résumé, on peut compter sur le pouvoir des mots pour modifier la manière d’être au monde, tout comme la manière d’être au monde modifie le sens des mots. La manière de parler et d’aborder les choses devient alors partie intégrante de la psychothérapie. Si l’on dit : « Comment allez-vous faire pour améliorer cette situation ? », à quelle partie du cerveau nous adressons nous ? À la raison, aux efforts, au rationnel, à la volonté… mais aussi, en conséquence, à la culpabilité, à la mauvaise estime de soi en cas d’échec. Si l’on dit : « Que ferez-vous de différent quand vous irez mieux ? », nous nous adressons à l’imagination, au visuel, au possible, à la capacité d’espérer. C’est comme si nous ouvrions une autre fenêtre, donnant sur un autre monde et une autre partie de soi. En Approche Centrée Solution, nous misons sur le fait que le contact avec cette autre manière de voir le monde et de se voir soi, peut créer les conditions d’un mouvement vers la transformation.
Pour cela nous utilisons ce que l’on appelle des Questions Projectives. Ce sont d’ailleurs plutôt des processus que des questions. Elles proposent, en effet, d’imaginer que, le problème ayant disparu, nous puissions découvrir à quoi ressemble le paysage libéré de cette difficulté. Ces processus mentaux sont peu familiers et il est souvent nécessaire de préparer les personnes aidées à abandonner l’analyse du problème pour les accompagner dans cette traversée vers un futur meilleur possible. « À quoi verrez-vous après cette séance que vous commencez à aller mieux ? … Si demain le problème évoqué a disparu, quel sera le premier indicateur de l’amélioration ? … Qu’est ce qui fera dire que vous avez encore avancé ? … »
On voit ici combien les questions projectives seront utiles pour ouvrir le champ des possibles. Comment et quand les proposer ?
- Quand dire c’est faire. John Austin. Ed Seuil
- Une Approche centrée solution en thérapie. Martine Nannini. Ed ESF